L'insomniaque déambule dans les rues du troisième arrondissement à des heures tardives. La bipolarité s'estompant au fils du temps, grâce aux miraculeux médicaments des mortels, elle semble étonnamment calme. Pourtant, la colère est toujours là, envoie dans les abysses de son être. Elle ronge ses entrailles jusqu'à n'en plus finir, elle est si bien ancrée qu'elle est impossible à déloger. Foutue colère qui lui fait faire des bien des choses. Foutue colère qui la rend incontrôlable. Mais ce soir, c'est le regard dans le vide que l'ange de la révolution s'avance sous la lumière des néons, passant devant des lieux qu'elle ne connait que trop bien. Maintes et maintes fois, elle s'est faite passer pour un démon, et chaque fois, elle s'est fait grillée. Il fallait qu'elle admette que ses talents de comédienne laissaient à désirer, et qu'elle était bien fait pour être un ange, sous ses airs de démons. Soudain, des cris la sortent de ses pensées. Des cris d'humains, ou de quelque chose d'autre. Elle accélère le pas, jusqu'à arriver dans la fameuse ruelle. Elle s'avance discrètement vers les humains, certains semble d'ailleurs bien amoché, mais elle reste dans l'ombre. Ses iris couleur jades se posent sur une silhouette rousse, de l'autre côté de la ruelle, qui semble vouloir intervenir. Malheureusement, à cette distance, elle ne discerne pas les prunelles de la personne en question et se retrouve dans l'incapacité de dire si cette dernière l'a remarqué. Alors elle se concentre, Celeste. Elle ferme les yeux et tend le bras vers les deux bagarreurs afin d'absorber leur colère. Elle sent ce sentiment qu'elle ne connait que trop bien s'infiltrer par tout ses pores, elle la sent grandir en elle, autant qu'elle sent son énergie diminuer. Maitre de son pouvoir, il reste quand bien même limité, et si quelqu'un n'intervient pas, cela pourrait se retourner contre eux. Et lorsqu'elle est en colère, Celeste, elle devient incontrôlable.

Elle la ressent, cette colère qui émane d'eux. Elle la sent s'infiltrer par tout ses pores, elle la sent grandir à l'intérieur pour finir par ronger ses entrailles. La colère, ça la connait, c'est le sentiment qui lui est le plus familier. Alors elle l'accueille à bras ouvert jusqu'à ce que ces satanés humains se calment, ou du moins ce qu'il en reste. Plus que deux désormais, les autres ont filé. Génial, ça fera ça de moins à aider. Son bras retombe contre son flanc, mais lorsqu'elle s'apprête à s'avancer, elle se rend compte que la rouquine de l'autre côté de la rue a pris les devants. Ses sourcils se froncent, reflétant une part de méfiance, et voila qu'elle lui renvoie un regard inquisiteur. « Monsieur ! Que vous est-il arrivé ? Ne tentez pas de bouger, surtout. Vous risqueriez d’aggraver vos blessures… » L'homme l'écoute, malgré les gémissements qui s'échappent de ses lippes et tandis que la rouquine s'occupe de l'un, l'ange décide d'aller voir la deuxième personne. Celle ci se trouve à terre, blessé au niveau du bras gauche. Avec aisance, Celeste s'avance vers elle et s'accroupie, lançant un second regard à la rousse secouriste.  « Salut, je m'appelle Celeste. Attendez, je vais vous aider à vous relever.  » Doucement, elle lui tend sa main pour que la personne la saisissent de son bras valide et ainsi, elle l'aide à se relever.  « Voulez vous que... -  » A peine a-t-elle le temps de finir sa phrase, que l'humain fuit à toute vitesse. Perplexe, elle reste figée un instant. Voila ce qu'on récolte quand on vient en aide aux humains, rien. Reprenant rapidement ses esprits, elle se tourne vers la jeune femme et l'homme en sang, affichant un faux sourire ravie sur les lèvres.  « Bon, et bien vous allez avoir deux infirmières pour le prix d'une.  » Ses iris clairs passent de l'homme à la rousse, avec un petit air de défi.

Après la fuite de l’humain blessé qu’elle a tenté d’aider, c’est avec perplexité qu’elle se tourne vers les deux personnes restantes. Une rousse, qui est infirmière semble-t-il, et l’autre humain blessé. Le sourire aux lèvres, elle s’avance vers eux en tentant une blague, ou une métaphore. Elle, elle n’est pas infirmière. Ce serait un comble. Rien que l’idée d’aider ces humains lui donne la nausée. La rousse sourit, et semble croire à ses propos. Ou alors, ce n'est qu'un subterfuge. « Effectivement. Si ça n’est pas un coup de chance, ça, je me demande bien ce que ça peut être. Allons. Tout d’abord, veuillez essayer de prendre une meilleure respiration, je vous prie. » Elle sourit, de nouveau. Puis, elle s’approche de l’humain blessé et touche son bras. Elle ne sent plus aucune once de colère en l’homme blessée. « Vous êtes infirmière, également ? Il me semble ne vous avoir jamais vu là où je travaille. Vous débutez peut-être ? » Ses jades, jusqu’alors rivées sur l’humain, toisent la rousse. Elle semble trop parfaite pour être vraie. Tout sonne faux dans sa bouche, même son sourit semble presque irréel. Et malgré ses soupçons, Amiel ne laisse rien paraître. Pour l’instant, la jeune femme la croit humaine, infirmière même. Alors autant s’amuser et jouer le jeu jusqu’au bout. « C’est une reconversion professionnelle, je viens de terminer ma formation. » qu’elle dit,  mensonge qui sort de ses lippes sans aucun scrupule. « Et vous, ça fait combien de temps que vous travaillez ? » qu’elle sort l’air de rien. Toutes unes ribambelles de questions naissent dans son esprit, des questions qui chercheront une incohérence dans les propos de l’infirmière. Puis, reprenant soudainement conscience de la présence de l’humain, elle se retourne vers lui. « Vous voulez qu’on vous emmène aux urgences ? Ma future collègue peut très certainement vous emmener dans l’hôpital où elle travaille. Au fait, vous travaillez où ? »

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